samedi 20 août 2016

Mr. Robot : Des codes pour changer le monde

Voilà bientôt dix mois que nous n'avions pas évoqué de séries sur ce blog. Pour nous remettre dans le bain, j'ai donc choisi de revenir sur l'un des phénomènes télévisuels les plus excitants du moment : Mr. Robot, dont la deuxième saison s'achèvera d'ici quelques semaines aux Etats-Unis. Créée par Sam Esmail, la série avait suscité un vif enthousiasme à la diffusion de sa première saison (que nous verrons prochainement sur France 2 d’ailleurs), remportant au passage moult récompenses dont deux Golden Globes. Soyez rassurés, je tenterai de décrypter ce succès sans aucun spoiler.


Création : Sam Esmail
Diffusion : 24 juin 2015 - en production
Genre : Thriller, drame
Nationalité : Américaine
Elliot est un jeune programmeur anti-social qui souffre d'un trouble du comportement qui le pousse à croire qu'il ne peut rencontrer des gens qu'en les hackant. Il travaille pour une firme spécialisée dans la cyber-sécurité mais un homme connu sous le nom de Mr Robot l'approche un jour pour faire tomber une compagnie surpuissante qui fait partie de celles qu'il doit justement protéger...
Rami Malek

D'épisode en épisode, Mr Robot s'est imposé comme une oeuvre hyper contemporaine et particulièrement originale, ne cessant de casser les codes pour mieux nous égarer et nous entraîner dans la folie de son héros. À l'instant où j'écris cette critique, la deuxième saison prend d'ailleurs une tournure complètement délirante, elle ne respecte plus rien et questionne constamment le spectateur sur ce qui est supposé être réel ou non.

Dès le pilote, nous percevons le monde à travers le regard plus ou moins déformant d'Elliot, un hacker aussi brillant que perturbé, profondément allergique à la société et bien décidé à en découdre avec une multinationale douteuse qu'il surnomme « Evil Corp », par le bais de piratages informatiques de plus en plus amples (on surfe sur le mouvement Anonymous donc). Magistralement interprété par Rami Malek, acteur à la gueule étrange et aux yeux toujours agités, ce parfait antihéros semble tout droit sorti de l'esprit d'un cinéaste dont Sam Esmail est visiblement très fan : David Fincher, qui s'était lui-même beaucoup intéressé aux méandres de la psyché humaine, ainsi qu'à notre société à l'heure du tout numérique. En effet, il n'est pas interdit de penser au Mark Zuckerberg de The Social Network, à l'héroïne punko-geek de Millénium, à l'anticapitalisme hallucinant de Fight Club ou encore à l'esthétique léchée de Gone Girl, avec cette superbe photographie en clair-obscur.

Christian Slater, quel soulagement de te retrouver en pleine forme
après Nymphomaniac de Lars von Trier

Mais au-delà de toutes ces références, la série fait preuve d'une réelle audace formelle et regorge de trouvailles qui n'appartiennent qu'à elle. À commencer par ces cadrages symétriques aux lignes de fuites très marquées, ou au contraire, ces champs-contrechamps filmés de manière totalement décentrée, où le visage du héros se retrouve systématiquement dans un coin de l'image, sous des murs et des plafonds oppressants, comme pour souligner son mal-être et son profond décalage avec le monde qui l’entoure. Devenue en quelques temps la marque de fabrique de ce qui constitue la grammaire visuelle de la série, cette simple idée de mise en scène prouve une nouvelle fois qu'à la télévision comme cinéma, les réalisateurs savent également placer leur caméra là où il faut.

Cependant, j'aimerais apporter un bémol concernant l'aspect très alambiqué du scénario. Si le réalisme technique défendu par Sam Esmail fait la force du show, il complique également la compréhension des non connaisseurs. Le langage informatique y est souvent ardu, à tel point que certains enjeux de l'intrigue nous paraissent extrêmement flous. Toutefois, même si plusieurs subtilités nous échappent, l'histoire reste suffisamment passionnante à suivre, pour la complexité psychologique de son personnage principal notamment, mais aussi pour le brio avec lequel elle décortique notre actualité.

Pour terminer, il est important selon moi de faire une mention spéciale à la bande originale de MacQuayle, qui est un régal pour tous les amateurs de musique électronique, même si elle plagie parfois un peu trop le travail de Trent Reznor et Atticus Ross sur les derniers longs-métrages de Fincher (oui, encore lui)... Vous n'avez donc plus aucune excuse pour ne pas vous mettre à Mr. Robot ! De mon côté, je vais peut-être rattraper mon retard et jeter un œil à cet autre phénomène estival qu'est Stranger Things. À suivre...


Note: 

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